Sous la menace de l’épidémie, c’est une rentrée qui sera certainement difficile pour beaucoup d’entre nous. Pour moi c’est l’attaque de la troisième chimio. Je pense que nous pouvons nous souhaiter réciproquement bon courage.
Entre consultations et examens, j’ai pu trouver le temps de passer quelques jours en Vallouise par un temps magnifiques. Indéniablement cet été fût la fête pour les parapentistes que j’ai pu voir depuis ma chaise longue profiter des plafonds à plus de 5 000 m quasi quotidiens.
Pour ma part je propose une petite exploration de l'histoire de l'alpinisme, mêlée de dessins que les circonstances m'ont inspirées.
La statue monumentale d’Edward Whymper, figure essentielle de l’invention de l’alpinisme occidental signale l’entrée de la Vallouise. Je peux vous présenter en regard celle de Evgueni Abalakov (1907/1948) qui avec son frère Vitali (1906/1986) fut à l’origine de l’alpinisme à la mode soviétique. J’ai découvert leur histoire dans le livre de Cédric Gras qui m’a été offert: « Les Alpinistes de Staline » que je recommande.
Evgueni était un peintre et un sculpteur reconnu. La statue est de lui, elle représente Un alpiniste soviétique au cimetière où il est enterré.
Elitiste, libéral et individualiste à l’Ouest, l’alpinisme s’organisa en conformité avec les clivages de la géopolitique : à l’Est, il fût organisé, rudement réglementé, autoritaire, bref collectiviste.
Le fait que Lénine, avant de prendre le pouvoir à Moscou passa quelques années d’exil en Suisse n’est pas étranger au développement de cette activité, un certain nombre de ses compagnons qui partagèrent son exil cédèrent à l’attrait de la haute montagne et s’investirent dans le développement de l’alpinisme lorsqu’ils furent au pouvoir de l’URSS. Celle-ci n’est pas dépourvue de magnifiques sommets, en particulier dans le Caucase et dans le Pamir qui est l’extrémité nord-ouest de l’Himalaya.
Dans le modèle soviétique d’une nouvelle société emmenée par l’enthousiasme des héros issus du peuple à la conquête du monde, l’alpinisme eût toute sa place…. À l’image de ce qui se fit également à l’époque sous les régimes nazi !
Mais le fait d’avoir été promue et soutenue par les réseaux du pouvoir n’épargna pas à l’organisation alpine les pires des soubresauts du système : dénonciations, purges, procès, goulag, assassinats…
Bien la peine pour ces héros de s’être esquinté à hisser des bustes de Lénine pour les installer sur des sommets de plus de 7000 m, et d’avoir bouleversé la toponymie du massif pour en faire une réunion du bureau directeur du parti à ciel ouvert!
7000 m. C’est la frustration des alpinistes soviétiques ! Au temps du rideau de fer, ceux-ci n’avaient accès à aucun des 14 sommets de plus de 8000 m, tous concentrés dans l’Himalaya, mais aucun dans la partie soviétique, le Pamir, qui propose lui profusion de 7000 tout aussi remarquables qui furent le théâtre de nombre d’exploits de facture soviétiques.
A signaler le souci rigoureux de l’école alpine soviétique de promouvoir la sécurité fondée sur des principes de formation, contrôle des compétences, entre-aide collective, et aussi d’ingéniosité technique illustrée par les compétences de Vitali Abalakov inventeur de procédés d’assurage qui sont toujours d'actualité.
Lors de notre traversée de la Sibérie en Transsibérien en juin 2017, nous fîmes étape à Krasnoïarsk et visitâmes le site de Stolby. C’est le pays des frères Abalakov, c’est là qu’ils s’initièrent à la grimpe !
Voilà, c'était les vacances, à nous la rentrée....
Pdo Bayart
23 août 2020