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22 août 2006 2 22 /08 /août /2006 19:36

 

L’article 1 des statuts d’origine des Tichodromes (Tichodrome: Oiseau qui niche dans les falaises et qui du fait de la taille de ses ailes doit se jeter dans le vide pour décoller, mais c'est aussi le nom de mon club de parapente!) précisait que l’objet du club était la promotion du « Paralpinisme ». Force est de contacter que cette volonté des fondateurs du club ne s’est pas vraiment concrétisée, tant les contraintes de l’alpinisme se sont révérées trop difficilement compatibles avec celles du vol libre, tandis que le potentiel de gain d’altitude  et de vol des ailes et des pilotes n’ont cessés de se développer, comme en témoigne le fameux atterrissage au sommet du Mont Blanc l’été 2003 d’un groupe de parapentistes partis « d’en bas »….

Il n’empêche ! Pour ceux qui comme moi ont une longue histoire d’amour avec la montagne et l’alpinisme, décoller d’un sommet de haute montagne qu’on a atteint par des moyens « naturels » reste quand même un rêve, même si celui-ci n’est pas souvent facile à réaliser…. 

J’ai donc saisi l’occasion de participer à un  week-end paralpinisme organisé par Delphine Pille du club des Baronnies : Ce samedi 30 juillet, nous sommes montés au refuge du Glacier Blanc (2542 m), et de là, au Dôme du Monétier. Nous étions une dizaine (dont un bi-place), encadrés par Delphine pour le parapente, et pour la montagne par le Guide Eric Mossière. Nous avons décollés sous le Pic du Rif à 3400 m, par un temps magnifique dans de très belles mais petites conditions……

Superbe, Superbe, Superbe…. Atterrissage dans les immenses prés en amont de Monetier. Merci encore Delphine, ce n’est pas facile de réussir un coup comme celui-là !

Une semaine plus tard, je me retrouve inopinément libre pour deux jours, alors que la météo annonce une accalmie d’un vent du nord jusque là passablement impétueux.

L’objectif est vite trouvé, ce sera le Dôme des Ecrins (4015 m) magnifique et classique décollage orienté nord. Un problème quand même : je suis seul, je n’ai trouvé ni parapentiste ni alpiniste pour m’accompagner. Qu’à cela ne tienne, pas question de laisser passer l’occasion !  En cross j’ai pris l’habitude de l’auto-stop stop pour le retour, cette fois, je vais tenter la cordée-stop pour l’aller.

Dés mon arrivée au refuge des Ecrins (3170 m, après 3h15 de montée au taux de 0.11 m/s), j’informe le gardien de mon projet et de mon problème : trouver une cordée qui accepte de me prendre sur sa corde pour la montée au Dôme, parcours intégralement glaciaire et donc crevassé. Le refuge est plein, 80 % des cordées vont au Dôme, je pense naïvement que cela ne posera pas de problème….

Ce n’est pas si simple ! J’ai mis une affiche au guichet d’accueil, durant le repas je fais le tour des tables. Sans succès. Je commence à me faire à l’idée de monter tout seul. Au petit matin la glace est bien gelée et les ponts de neige sont solides. Très sincèrement je pense que le risque serait très raisonnable, mais je préférerai quand même ne pas le prendre, ne serai-ce que préserver mon image d’alpiniste prudent et responsable, et aussi sans doute pour m’épargner une pression psychologique inutile avant de décoller.

 Faut-il imputer l’insuccès de ma quête à la crainte de s’encombrer et de risquer d’être retardé, ou bien aux ravages d’une idéologie sécuritaire qui aurait atteint le milieu montagnard et ferait craindre, même pour un parcours aussi classique, de prendre sur sa corde un « inconnu » devant le « risque » de voir engagé sa responsabilité en cas de problème,  ? Sans doute un peu des deux !

Mais non ! Je suis trop sévère, car in extremis, je réussis à faire affaire avec une cordée en partance pour la Barre, qui accepte de me prendre sur sa corde jusqu’au Dôme. Bien sûr, je dois d’abord passer un très légitime « examen » oral: oui, j’ai des crampons, oui, ils sont bien réglés et je sais m’en servir, non, je ne les retarderai pas… J’apprendrai bientôt qu’il s’agit d’un guide et de son client belge. Ils refuseront ma proposition de contribution financière…Tope là, bonne nuit et à demain matin pour le ptit dèj à 3h30 !

Au matin, c’est la phase pratique de « l’examen », mais je m’en sors bien, nous prenons rapidement la tête du serpent lumineux  qui se love sur la face nord de la Barre, et quand nous arriverons au sommet du Dôme à 7h ( au taux de montée de 0.109 m/s), seul le soleil nous aura précédé, et encore, de peu de temps ! Nous nous séparons, ils continuent vers la Barre. Merci encore à toi « Gepetto » et aussi à ton client !

Au sommet, les conditions de déco sont idéales : 5 à 10 km/h de NE, aussi je décide de décoller du sommet même, solution plus élégante que le déco habituellement recommandé sous la brèche Lory.

Il est bien tôt ! Attendre un peu ou décoller tout de suite ? Si le vent se renforce, cela peut venir très vite, la prudence pour assurer le déco est de ne pas tarder.

Décollage.

J’avais mon plan de vol en tête depuis le début. A cette heure ci, rien d’autre à espérer qu’une aérologie calme, donc j’ai l’intention de faire un vol de finesse, au plus loin qu’il sera possible, le but ultime étant de me poser au bout de mon jardin à l’atterro officiel de la Bâtie des Vigneaux si cela est possible, et de consacrer toute mon attention au paysage.

Je tire donc à droite, passe sous le sommet de la Barre (4102  m), en croisant au passage toutes les cordées qui se dirigent vers le Dôme, et je réponds à leurs saluts…. A la brèche des Ecrins, je bascule sur le versant Glacier noir, le vide se creuse instantanément de plus de 1500m, et je me fixe un cap que je n’aurai plus à modifier avant les manœuvres de préparation à l’atterrissage. A cette altitude cela va très vite, ma bonne petite Kenya file comme le vent.

Je passe très haut au-dessus du glacier noir et de la Bosse de la Momie, puis c’est l’arrête du Pelvoux que je traverse à la hauteur du bas du glacier des Violettes : Il y a quelques années, c’est de là que nous avions enfin pu décoller, après avoir deux fois dépliés et repliés nos ailes dans un brouillard qui nous poursuivait depuis le sommet !

Puis c’est la traversée du vallon du Sélé,  derniers paysages exclusivement rocheux et glaciaires, j’arrive sur les alpages de l’arrête de la Rouya et de la Blanche. Une harde de chamois déboule loin en dessous de moi à une vitesse impressionnante !

J’arrive en terrain connu : le décollage de Puy Aillaud, et je suis à 1500 m d’altitude à la verticale de l’atterro de Vallouise (1200 m). La sagesse commande de s’y poser, j’ai pu calculer qu’il m’aurait fallu 4 à 500 m de gaz de plus pour aller jusque la Bâtie, mais mon vol aura prouvé que ce serait possible depuis le sommet du Pelvoux (3946 m), ce sera donc pour la prochaine fois !

Je me pose. Il est 8 h. Le camping de Vallouise (1100 m) s’éveille….

En distance, cela fait un vol de 15 km à finesse un peu plus de 6, mais ce n’est pas cela qui est vraiment important !

Une heure après, les sommets sont encapuchonnés, je n’ai donc pas eu tort de ne pas m’attarder !

 

                                                                        Pierre-Do Bayart, 6 Août 2006.

 

 

 

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commentaires

O
Salut vous 2,C'est sympa ce blog ! Bravo pour les récits et les illustrations! Je ne te connaissais pas ce don Pierre-Do. J'ai trouvé l'adresse dans parapente mag et cela faisait un moment que je voyais passer un Pierre Bayart vers valence en parapente pour la CFD et je me demandais si c'était bien toi...As-tu un e-mail perso pour ne pas encombrer ton blog avec nos souvenirs d'anciens combattants ?à+Olivier
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J
Joli vol.... 6, c'est la finesse d'un planeur aérofreins sortis ! Une fois rentrés, le chiffre atteint 60 sur les bêtes de course. De quoi rallier La Bâtie sans soucis.
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